Greek term |
blattion
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French translation |
étoffe
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English translation |
fabric
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Definition |
Le terme "blattion" (diminutif de "blatta", la pourpre) est utilisé à l'époque byzantine de manière générique pour faire référence aux étoffes, en principe de soie. Il n'implique plus que la couleur du textile soit pourpre, même si, parfois, lorsque aucun autre adjectif ne précise la couleur, on peut supposer que ce soit le cas. Sur l'évolution sémantique du terme, cf. Guilland 1949, p. 333-338. On trouve aussi l'adjectif "blatenios" (ou "blateinos") pour qualifier des tissus de soie dans le Testament d'Eustathios Boïlas [1] et dans celui de la nonne Marie (doc. Iviron II, no. 47) [2]. Les blattia mentionnés dans les documents sont parfois décorés de motifs animaliers, tels que griffons [3, 4], lions, par exemple [5, 6], aigles bicéphales [7], paon [8], ainsi que de motifs non figuratifs, comme des lentilles (?) [9], damier (?) [10] ou croix [11]. Pour un exemple de soie décorée de griffons, voir Muthesius, A., The Griffin Silk from St. Trond, in Muthesius 1995, p. 147-164; Muthesius 1997, pl. 15. Pour des soies décorées de lions (et d'éléphants), Muthesius 1997,p. 55-76; ead., Byzantine and Islamic Silks in the Rhine-Maaslands before 1200, op. cit., p. 105-118; Muthesius 1997, p. 24-57 et pl. 2-13. Pour un décor avec des paons, ibid.. pl. 34A , 51A (paons dans des médaillons). Les blattia peuvent aussi comporter des inscriptions [12]. Ils sont de différentes couleurs: pourpre, rouge, jaune, blanc ou noirâtre; parfois, ils incorporent du fil d'or (chrysos, chrysokladarikos), cf. par ex. [3]. Quelquefois, leurs bordures sont traitées différemment du reste de l'étoffe, cf. entre autres [8]. Le type ou la qualité du textile peut être précisé par différents termes techniques: phouphoudin [13], hexamitos [11, 12], narthikotos [14], katablattion [15, 16]. Le sens de "diblattion" et "triblattion" a été très discuté. Pour l'élucider, on se fonde généralement sur Pierre Damien, qui reçut de telles étoffes en cadeau en 1065, et qui écrit: "triblathon (...) trium quippe colorum est; et blathon pallium dicitur, unde triblathon pallium vocatur, quod trium cernitur esse colorum" (Epistolai IV, 7, in PL 144, col. 308). Le passage a été interprété de deux manières différentes : la première, que les diblattia et triblattia sont des étoffes respectivement bicolores et tricolores, la deuxième, qu'elle sont des étoffes deux fois ou trois fois teintes. Cette dernière explication ne résiste pourtant pas à une analyse approfondie des textes (cf. Guilland 1949, p. 339-348), ni à la confrontation avec les techniques textiles. Guilland propose de voir dans les diblattia et les triblattia des étoffes à deux et à trois bandes de tissu de soie (la même interprétation semble retenue par Hendy 1985, p. 308, qui cite des skaramangia amphiesmena apo diblattion, qu'il comprend comme “made up with double borders”, en renvoyant à Guilland) mais cette interprétation, non seulement explique mal les différentes occurrences des termes, mais se heurte au matériel retrouvé. Gautier, Attaliate, p. 96 et 97, n. 43; p. 128, n. 57, propose une autre traduction encore "étoffe à double épaisseur", "à triple épaisseur", mais l'auteur semble ne pas avoir connaissance de l'explication de Pierre Damien. Pour Jacoby 1991-1992, p. 458, n. 29, il n'y a pas lieu de réfuter la validité de la définition de Pierre Damien, il s'agirait donc bien d'étoffes de deux, respectivement trois couleurs. Muthesius 2002, p. 163 et 1995, p. 293, sans reprendre toute la discussion, semble considérer comme évident qu’il s’agit d’étoffes trempées deux ou trois fois dans la teinture, mais un tel procédé ne permettrait pas d’obtenir des tons suffisamment différenciés pour justifier les oppositions de qualité que supposent les textes (cf. Gardiner 2014, p. 154). Il faut revenir à Pierre Damien, mais en expliquant son texte de manière plus précise et plus technique. Galliker 2014, p. 153-158 propose une explication convaincante. Elle remarque que ces termes sont utilisés essentiellement en rapport avec des tissus historiés et en conclut que ces tissus sont constitués de ce que l’on appelle une armure à effet trame (weft-faced weave), c’est-à-dire que les fils de trame sont plus visibles que les fils de chaîne. Motifs et fond peuvent être ainsi de couleurs différentes. Pour expliquer pourquoi, une seule couleur est nommée pour les étoffes diblattion ou, éventuellement, deux pour les triblation, on peut penser que ces textes désignent les couleurs dominantes qui caractérisent l’étoffe et permettent de l’identifier sans prétendre en faire une description systématique. Les termes composés constitués d'une couleur et de "diblattion" ou "triblattion" insisteraient sur les couleurs des motifs façonnés et non du fond. On peut mentionner un "σκαραμάγγιον ὀξὺν πρασινοτριβλάττιον" du Livre des Cérémonies (Reiske, De Cerimoniis, I, p. 442, l. 2), qui serait donc un skaramangion, de fond pourpre (oxys), et dont le vert (prasinos) serait la couleur dominante des motifs. De la même façon, un tissu décrit comme "ὀξὺ λευκοτρίβλαττον" [21] aurait un fond pourpre et des motifs dont la couleur dominante serait le blanc. L'expression "βλαττίον κιτρινοτρίβλαττον, οὗ ὁ ἀὴρ ὀξύς" [17], c'est-à-dire "étoffe de soie jaune-triblatton, dont le fond est pourpre", donc une étoffe pourpre avec des motifs dont la couleur dominante serait le jaune, serait une autre formulation pour une étoffe de même type. On trouve même une étoffe dite "βλαττίον κιτρινοτρίβλαττον" [18], sans autre mention de couleur, mais avec un motif de griffon. Il faut ici comprendre un tissu à fond jaune, sans que les couleurs du griffon ne soient précisées. Un gilet fait d’une étoffe de soie [19] est dit diphoton. Galliker 2014, p. 158-159 rapproche ce terme d’autres qualificatifs pour des étoffes formées par un adjectif de couleur précédé du préfixe "di-" : il s’agit de tissus monochromes avec des effets ton sur ton, dans une technique qui annonce celle des damas. Certaines formulations sont plus difficiles à comprendre : "ἕτερον βλαττίον, καταπέτασμα διβλαττίον ὀξὺν, ὁ ταὼν κογχευτός, μετὰ περιφερίων ἐσοφορίων πιστακέων" [20]. Il est difficile de savoir si l’expression "diblattion oxyn" désigne une étoffe dont le fond est pourpre avec un motif, un paon, d’une autre couleur non précisée (ou, mais, moins, vraisemblablement l’inverse), tandis que la couleur pistache des bordures serait une troisième couleur. On pourrait aussi comprendre que le paon serait de la même couleur que les bordures. Un autre terme composé, "makrotriblatton" : "βλαττία δύο, τὰ κρεμάμενα εἰς τὸν ἅγιον Πρόδρομον <>, τὸ μὲν ἄνωθεν ὀξὺ λευκοτρίβλαττον μετὰ περιφερίων ἐσωφορίων, τὸ δὲ κάτω κρεμάμενον μακροτρίβλαττον μετὰ περιφερίων ἀτταλειωτικῶν" [21, 22]., reste peu clair: veut-il simplement dire "long et triblatton" ou a-t-il un autre sens, technique, qui nous échappe ? Blattion peut aussi désigner un tissu qui recouvre une reliure. Compte tenu du caractère précieux d'une grande partie des reliures mentionnées, on peut admettre qu'il s'agit de soie dans cet emploi [23, 24 |
Updated at |
December 30, 2016 08:13
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